Saint Gildas

Gildas, saint breton et (ou) personnage historique : une vie bien remplie !

Si les serviteurs de Dieu devenaient riches, ils répandraient sur le peuple moins de grâces que de scandales.
Comme pour beaucoup de saints, la question se pose : Gildas a-t-il vraiment existé ? Et, combien y a-t-il eu de Gildas ?

Saint Gildas était surnommé le Sage ! Son nom, d’origine celtique, signifierait « celui qui protège ». Son rayonnement et sa popularité en Bretagne et dans tout l’Ouest existent dès le VIIe siècle. On l’invoque alors contre la rage, la folie, les maux de tête et de dents, ainsi que comme protecteur des porcs et des chevaux. D’Ouessant à Rhuys, Gâvres, Groix, Belle-Île, Houat, Auray et tous les Locqueltas (lieu consacré à saint Gildas), la Bretagne est pleine de communes, églises, chapelles et lieux-dits qui portent son nom et témoignent du culte qu’il a suscité, de la ferveur aussi !

L’abbaye de Rhuys, fondée par Gildas au
VIème siècle, construite en bois
sur les restes d’un oppidum

Des sources attestent de l’existence de Saint Gildas : un calendrier précoce des saints de l’Eire, une lettre de saint Colomban au pape Grégoire le Grand qui lui rend hommage. On a de lui plusieurs écrits dont un Sommaire de l’histoire de l’Angleterre depuis sa conquête par les Romains et une épître, fort sévère pour les politiques et le clergé de la région, qu’il accuse de paresse et de simonie (achat et vente de biens spirituels, sacrements, postes et charges ecclésiastiques, services…). Il existe aussi trois Vies de saint Gildas datant du Moyen Âge. Une fut écrite vers le milieu du XIème siècle, c’est une biographie du saint suivie de l’évocation d’événements où se mêlent histoire et légende. Une deuxième fut composée au XIIe au Pays de Galles mais ne fait pas mention des activités de Gildas en Armorique. Une troisième vie date du XIIIe mais ne rajoute rien aux précédentes.

Comme beaucoup d’autres saints bretons, Gildas est d’bord un saint brittonique. Fils d’un seigneur d’Écosse, ou du pays de Galles, il commence sa formation de moine au pays de Galles sous la direction de saint Iltud. Impliqué dans le monde et intellectuel, Il évangélise le nord de l’Angleterre et l’Irlande, compose un missel liturgique à l’usage des Celtes.

Gildas gagne ensuite l’Armorique, sur une auge de pierre, ou plutôt en embarquant sur un curragh, et débarque sur l’île de Houat, face à la presqu’île de Rhuys. Il aspire à mener une vie d’ermite, dédiée à la prière et la méditation des Écritures. Mais, très vite, le charisme de Gildas se répand et les disciples affluent. Fascinés par la profondeur spirituelle de Gildas, les pêcheurs de Houat en parlent aux habitants de la côte qui le supplient de venir à Rhuys y établir un monastère. La demande émane aussi de Gwereg, le comte de Vannes. C’est de ce monastère qu’il étendra son influence spirituelle à toute la Bretagne.

Gildas termine sa vie vers 570 dans la solitude de l’île de Houat. Avant de mourir, il aurait demandé :  » Ne vous disputez pas ma dépouille : dès que j’aurai rendu l’esprit, déposez-moi sur un esquif et poussez-le vers la mer, pour qu’il aille où il plaira à Dieu « . La légende rejoint alors l’histoire. Les vagues auraient ramené l’embarcation au rivage et s’échoue au Crouesty, en Arzon. Une chapelle y est construite. Ses restes, inhumés dans l’abbaye de Rhuys, ont été transférés, lors des incursions des Normands, à Bourg-Dieu-sur-Indre près de Châteauroux.

Deux petites anecdotes

Quand deux saints se rencontrent

Le futur saint Cado était entré à l’abbaye de Rhuys. Il enseignait le latin à ses élèves et leur faisait apprendre Virgile par cœur, car il aimait beaucoup ce grand poète latin qui vivait une cinquantaine d’années avant la naissance du Christ. Poète païen, il était étudié (et apprécié) par le monde chrétien à cause de la grande qualité de son œuvre. Cado portait un amour tout particulier à ce poète et souffrait qu’il fût condamné à la damnation, faute de n’avoir pu connaître la Lumière du Christ. Un jour qu’il se promenait avec Gildas, en portant son Virgile sous le bras, il se mit à pleurer en pensant que l’auteur de ce livre était peut-être en enfer. L’abbé de Rhuys le réprimanda, avec une certaine fermeté. A ce moment, une violente rafale de vent venue du large emporta dans la mer le livre que tenait Cado. Il en fut consterné, se remit à pleurer et Gildas le gronda une fois de plus ! Une fois rentré dans sa cellule, il se promit : « Je ne mangerai pas une bouchée de pain et je boirai pas une goutte d’eau avant de savoir au juste qu’elle part Dieu a faite à celui qui à chanté sur la terre comme les anges chantent dans le Ciel ». Epuisé, il s’endormit et entendit en songe une douce voix:  » Prie pour moi, prie pour moi, ne te lasse pas de prier, je chanterai éternellement les miséricordes du Seigneur ». Le lendemain, un pêcheur apporta à l’abbaye un saumon. En le préparant, l’on y trouva le Virgile que le vent avait emporté. Saint Cado, consolé, comprit alors que l’âme de Virgile était sauvée !

La cloche de Saint-Gildas

Gildas avait ramené d’Irlande une cloche très belle et de très douce voix que plus d’un enviait, en particulier Cado qui voulait établir un oratoire près d’Etel. Mais Gildas avait résolu de l’offrir au Pape. Il se rendit donc à Rome. Surprise! Le Souverain Pontife ne pût tirer aucun son de la cloche celtique. Saint Gildas s’en excusa et essaya de faire tinter la cloche qui resta muette… et raconta comment Cado avait exprimé le désir de l’obtenir. Le Pape avec sagesse dit alors à Gildas « Retourne vers Cado et donne lui l’objet, car le miracle dont je suis témoin montre que cette cloche doit lui appartenir ». A peine Cado eut-il la cloche entre ses mains, qu’au premier mouvement elle se mit à sonner… Il l’emmena ensuite au Pays de Galles pour le protéger de toute violence. La légende raconte aussi que quiconque prêtait sur elle un faux serment perdait l’usage de la parole sauf s’il avouait sa faute.

Plusieurs Gildas ?

La question se pose, tant l’activité dont a fait preuve saint Gildas est débordante et extraordinaire. Même si l’on ne sait pas avec certitude s’il est vraiment venu en Bretagne armoricaine ! Si l’on trouve sa trace comme fondateur du monastère de Rhuys – confondu peut-être avec un obscur Gueltas, véritable fondateur- on en trouve la trace à beaucoup d’endroits en Bretagne comme à Carnoët, avec une chapelle Saint Gildas abritant un tombeau « dit de Saint Gildas » qui guérit de la folie. A Melrand, c’est un rocher qui abrite l’ermitage aménagé dans la grotte formée par le surplomb de la roche où Gildas aurait séjourné. A Rhuys même on parle de deux ou trois « saint Gildas » dont on aurait des restes de sépultures. On désigne sous le même nom le chancelier du roi Gradlon. A Bohal (Malestroit), l’église est vouée à saint Gildas. On parle aussi d’un autre Gildas qui aurait eu sept frères !

Saint Gildas représenté en évêque,
chapelle de Bieuzy

On sait aussi pêle-mêle qu’à plusieurs endroits, il combattit le paganisme et fit de nombreux miracles. Le principal est la résurrection de sainte Triphine, décapitée par Conomor. L’on raconte aussi qu’emporté sur la mer par des démons, il les mit en fuite et termina sa navigation avec son froc pour voile et sa crosse, pour mât. Il ferait enfin partie de ces saints saurochtones pourfendeurs de dragons.

Au final, les vies de saint Gildas ont été rédigées au moins cinq cents ans après sa mort. Ce que l’on peut en conclure est qu’un Gildas, canonisé vox populi, comme c’était le cas à l’époque, a certainement vécu mais est-il unique ou est-ce la synthèse de plusieurs personnages à la vie exemplaire ? Toujours est-il que partout en Bretagne, à Houat, Gâvres et ailleurs l’on trouve des statues avec mitre et crosse, signes distinctifs des évêques et pères abbés, parfois la crosse tournée vers lui même, père abbé de Rhuys ou vers l’extérieur en tant qu’évêque

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