Saint Guénolé

Saint Guénolé, fondateur de Landévennec, un saint dans une famille de … saints !

La vie de Saint Guénolé, connu aussi sous le nom de Winwaloeus, s’inscrit comme beaucoup d’autres, vous le savez entre le merveilleux et la réalité. Elle fait partie de ce que l’on peut appeler « l’enchantement breton ». Sa vie et son action se situent dans le contexte historique de l’immigration bretonne en Armorique au cours des Ve et VIe s. Les sources ne sont guère abondantes et la Vita sancti Winwaloei, seul document de référence, a été rédigée dans les années 870-880 par Wrdisten (Gurdisten), abbé et le moine Clément du monastère de Landévennec connu à l’époque sous le nom de Landowinoch. Elle aurait été précédée ou plutôt pense-t-on aujourd’hui d’une Vie brève, qui serait un  abrégé de Gurdisten, réalisé entre le Xe et le XIIe dans le Nord ou en Grande bretagne… On a parfois, à tort, confondu saint Guénolé avec saint Gwenaël qui fut en réalité son successeur comme abbé de Landévennec. Les textes sont caractéristiques des règles de l’hagiographie médiévale et met en valeur les nombreux miracles attribués à Guénolé : il ressuscite, guérit, convertit, console, fait jaillir une source…

Son père, saint Fragan, et sa mère, sainte Gwenn, auraient débarqué dans la baie de Saint-Brieuc, venant probablement du pays de Galles, pour se fixer à Ploufragan. Guénolé est leur troisième fils. Il serait né à Ploufragan, où ses parents avaient trouvé refuge avec leurs deux autres fils, Guethenoc et Jacut. Dans d’autres traditions, il serait né à Plouguin où est montré le lieu supposé de sa naissance, une motte féodale. Une petite fille, Clairvie allait ensuite rejoindre la fratrie.  Sa mère , sainte Gwenn était appelée Teir-bronn (trois seins). Les époux et leurs deux premiers fils sont nés au Pays de Galles, leur pays d’origine. Guénolé serait né peu de temps après l’arrivée de la famille en Bretagne armoricaine, à l’embouchure de la rivière Brahec, au fond de la baie de Saint-Brieuc. Selon la légende, Dieu lui accorde un troisième sein pour pouvoir allaiter ses jumeaux encore tout jeunes et ce nouvel enfant ! Mais, il semblerait que ce soit une mauvaise interprétation de l’expression latine trimammis signifiant « trois fois mère » !

Comme c’était alors la tradition, l’enfant et ses frères sont confiés dès leur petite enfance à un moine d’origine irlandaise nommé Budoc qui tenait une école monastique sur l’îlot de Lavret, archipel de Bréhat. Le voyage se teinte alors de merveilleux. Lorsque Fragan emmena ses trois fils en bateau vers l’île Lavret, les voyageurs furent pris dans une tempête aussi violent qu’inattendue. Guénolé la calma par un signe de croix. C’est là la raison pour laquelle Guénolé, invoqué pour la quiétude des marins, est aussi le patron des femmes de marins-pêcheurs.

Auprès de l‘exigeant saint Budoc, l’enfant reçoit une solide éducation. Travailleur, sage et érudit, Guénolé qui avait su dompter un tempérament fougueux, fut vite reconnu comme  capable de fonder une abbaye. Son maitre lui confie alors 11 compagnons pour aller ensemble fonder un autre monastère. On ne leur indiquait alors aucun lieu, ils iraient là où la Providence les conduirait. Ils traversèrent la Domnonée (Trégor et Léon), avant d’atteindre le point où l’Aulne se jette dans la rade de Brest. Ils traversèrent la rivière et se fixèrent là pour y vivre la vie monastique. Ils s’étaient d’abord établis dans une autre île appelée Tibidy, peut-être l’île de la maison de prières, à l’Hôpital-Camfrout, dans la rivière du Faou. Là ils restèrent trois années. Au bout des trois ans, vers 490, il reprirent eur marche et l’histoire raconte que Guénolé ouvrit miraculeusement un passage dans la mer pour aller fonder une nouvelle abbaye sur la rive opposée de l’estuaire, à Landévennec.

« L’hymne achevé, ils s’engagèrent à même la vaste forêt qui s’étendait sur le rivage et, parcourant le vallon qui de loin leur était apparu, ils y découvrirent un espace entouré de coteaux et de bois, façonné comme le creux d’une fronde. C’était un endroit parfaitement calme, ceint de bois et buissons, roches acérées et hautes collines d’un côté, et de l’autre venant mourir sur la mer et la rivière ».(…) « C’est un lieu extrêmement agréable, exposé au soleil, inaccessible à tous les vents, sauf un peu le vent d’Est ; comme un paradis magnifiquement tourné vers le soleil levant… un jardin orné de fleurs de toutes sortes de couleurs, où récolter les fruits non seulement de la terre mais encore et surtout du ciel » Vie de Saint Guénolé, IXème siècle

La règle et les usages auxquels se conformaient Guénolé et ses disciples étaient issus de la tradition celtique d’Irlande, marquée par une tonsure particulière qui allait d’une oreille à l’autre laissant les cheveux longs à l’arrière, une ascèse extrêmement sévère, des prières et jeûnes prolongés… L’on sent dans Guénolé, l’image de l’un de ces nombreux ermites bretons qui, au vie siècle, peuplèrent les îles et les abers de la péninsule armoricaine. Inaugurant une vie de style érémitique au fond de ce vallon solitaire qui allait désormais prendre son nom de saint Guénolé, les moines gardèrent la règle celtique jusqu’à ce que  Louis le Pieux, en 818, leur impose la Règle de saint Benoît.

Saint Guénolé avait aussi  en charge l’Ile de Sein qui s’appelait à l’époque Insula Seid­hun. L’on raconte qu’il y protégeait les habitants qui se laissaient influencer facilement par de beaux parleurs envoyés par le diable. Il faisait l’aller-retour entre l’abbaye de Landévennec et l’île, et s’arrêtait souvent au Bec du Raz pour y contempler sa cité posée sur l’eau. Il envisageait de construire un pont entre le Bec et l’île afin de permettre des voyages moins dangereux par mauvais temps…

Un beau jour, un ange apparaît pour lui dire que les habitants du ciel réclament sa présence et Guénolé meurt, comme st Benoît de Nursie au milieu des moines en prières.

A la mort de Guénolé, dont on ignore l’année, sans doute vers 532, le monastère qui, dans la suite, s’édifia à proximité garda précieusement ses reliques et entoura de vénération la mémoire de son « fondateur ».  Guénolé avait fait de Landévennec le centre religieux de la Bretagne armoricaine. Mais, les raids normands, en 913, les obligent à fuir, emportant avec eux les reliques du saint jusqu’à Montreuil-sur-Mer où elles sont vénérées jusqu’à la Révolution, elles sont alors brûlées.

Le culte de Guénolé par contre, grâce aux nombreuses dépendances du monastère, se répandit dans toute la Cornouaille, le Léon et au-delà comme en témoignent aujourd’hui encore le grand nombre de chapelles et de statues qui s’y trouvent. L’on rappelle aussi ses miracles dont le principal touche sa petite sœur. Un jour, un jars de la basse-cour familiale s’empare des yeux de Clairvie et les mange tous les deux. La fillette rentre chez elle en hurlant de douleur. Guénolé arrivant alors à la maison familiale trouve ses parents et sa sœur dans la plus grande détresse, il décide d’aller récupérer les yeux de Clairvie. Il se rend à l’endroit où sont gardées les oies, repère le jars au centre du groupe. Il l’éventre et reprend les yeux de sa sœur pour les lui rendre. Il la signe de la croix et celle-ci recouvre la vue. Il sermonne ensuite le jars, après l’avoir guéri !

Guénolé fait aussi partie des « saints phalliques » réputés pour venir en aide aux femmes désespérées par la stérilité. Celle-ci  a longtemps et en particulier au Moyen Âge, été vécue comme une malédiction. Pour les travaux des champs, les paysans avaient besoin de bras. Alors, les femmes sans enfants priaient en récitant leur chapelet et allumaient des cierge devant la statue de Guénolé. Certaines allaient même jusqu’à s’y frotter dévotement le ventre et le jour de sa fête se rendaient en pèlerinage aux sources miraculeuses des chapelles Saint-Guénolé. Guénolé n’y est au final pas pour grand-chose puisque il s’agit sans doute d’une  confusion entre son nom et « gignere » qui signifie engendrer en latin !

Guénolé et la légende de la ville d’Ys…

Emile Souvestre,  Théodore Hersart de la Villemarqué et Anatole Le Braz ont collecté et fait connaître cette légende qui jusqu’au milieu du XIXe siècle n’était transmise qu’au coin du feu dans la plus pure tradition bretonne.  Plus tard, ce sont les bretons, Henri Queffelec (1962), et Michel Le Bris (1982)  qui se sont emparés de la légende. Henri Queffelec en a fait presque un roman historique, tandis que Michel Le Bris en a créé une version allégorique entre deux mondes. Cette légende représente la fin du monde celte de sa mythologie et ses divinités. A partir des Ve et VIe siècles, c’est désormais le christianisme qui s’impose.

Le roi Gradlon régnait sur la pays de Cornouaille, il avait épousé une déesse du Nord, Malgven, qui mourut en pleine mer en mettant au monde une fille appelée Dahut. La petite fille et son père vivaient à Quimper, capitale de Cornouaille. Avec le temps, Dahut devint une très belle jeune femme, à la beauté envoutante et sauvage, à l’image de l’océan auquel elle savait appartenir, puisqu’elle était née en mer. Exaspérée par l’influence de l’évêque Corentin et du moine Guénolé sur son père et sur la Cornouaille, Dahut demanda un jour à Gradlon de lui construire une cité sur la mer, pour elle seule. Le projet était grandiose, et allait épuiser les finances du royaume, mais, par amour pour sa fille, le père s’exécuta et fit construire une ville magnifique, qui devint vite très riche et luxueuse. Elle devint aussi la ville de la luxure et de toutes les débauches, à l’image de la vie sulfureuse de la jeune fille qui multipliait les amants et n’hésitait pas à commettre des meurtres. Corentin, voyant d’un mauvais œil cette cité pleine de débauche, envoya Guénolé pour rétablir l’ordre, sans succès. Saint-Guénolé, abbé de Landévennec, est donc l’homme de Dieu qui tente de remettre Ys dans le droit chemin et particulièrement la princesse Dahut. Le diable en personne finit par s’y inviter et mena la ville et sa princesse à leur perte, toutes deux englouties par la mer, rendant ainsi Dahut à l’Océan. »

Cantique à Saint-Guénolé

Gwenole_tad_benniget

1. Eun dibab ho-peus grêt:
Mond war roudou Jezuz.
Skañv oa e zamm warnoc’h,
Diboan e yeo ‘vidoc’h.

D: Gwenolé, tad benniget,
Selaouit or galvadenn ;
Dougit beteg Doue
Pedenn ho pugale.

2. Pinvidig gand netra,
Ho taouarn oa digor,
Ha Doue a roe deoc’h
Kement ho-poa ezomm.

3. Diskregi ho-peus grêt
Euz kement ho talhe,
Ha distag diouz pép tra
D’an Neñv oc’h bet douget.

4. Seul vui e ro Doue
Seul vui e kresk ar c’hoant
Hag an neb e reseo
‘N em reseo digantañ.

5. Lezet ho-peus bepréd,
Gand doujañs, ar Spered
Da gizella ennoc’h
Kened marzuz an Dremm.

6. Gand Doue ‘peus bevet
Hoc’h unan dirazañ,
Ha gedour tarz an deiz,
Dibabet ‘peus ar Peoc’h.

1. Vous avez fait un choix :
Aller sur les traces de Jésus.
Son fardeau vous était léger,
Son joug, sans peine.

R: Guénolé, Père béni,
Ecoutez notre appel.
Portez jusqu’à Dieu
La prière de vos enfants.

2. Riche de rien,
Vos mains étaient ouvertes
Et Dieu vous donnait
Tout le nécessaire.

3. Vous avez décroché
De tout ce qui vous retenait
Et détaché de tout,
Au ciel, vous avez été porté.

4. Plus Dieu donne
Et plus grandit le désir
Et celui qui reçoit
Se reçoit de Lui.

5. Avec respect,
vous avez toujours laissé l’Esprit
Sculpter en vous
La beauté merveilleuse du Visage.

6. Avec Dieu, vous avez vécu
Seul avec Lui,
Et guetteur de l’aurore,
Vous avez choisi la Paix.

Padraig Landeveneg

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